• REVUE DE PRESSE – LE
DIABLE PROBABLEMENT n° 10
RADIO, TELEVISION

La revue de presse de Jacques Munier, le 5 octobre 2012.
PRESSE, WEB

Le Monde des livres, 8 novembre 2012
Le "malentendu
fondamental qui régit les rapports humains", comme l'écrit
Anaëlle Lebovits-Quenehen, directrice de publication, est au coeur du
10e numéro de la revue Le Diable
probablement. En plus d'un dossier sur les représentations
contemporaines de l'amour, Le Diable
propose de longues interviews d'acteurs, ces "artistes que nous courons voir
interpréter pour nous les histoires d'amour les plus heureuses et les
plus désespérées".
Valeria Bruni-Tedeschi, Denis Podalydès (chroniqueur du " Monde des
livres "), Charlotte Rampling, Marina Hands ou encore Philippe Caubère
évoquent ainsi leur métier, le lien qu'ils entretiennent avec le désir
du metteur en scène, celui du spectateur, leur rapport charnel aux mots
des auteurs qu'ils interprètent, mais aussi la place de l'amour,
toujours, dans leur vie.
R. L.

Mouvement.net, Bruno Tackels, 30 janvier 2013
Le diable probablement amoureux
Le Diable probablement / Matthias Langhoff / Anne-Lise Heimburger
Pour son nouveau numéro, la revue Le
Diable probablement s’amourache.
A lire, coordonnés par la comédienne Anne-Lise Heimburger, de nombreux
entretiens d’acteurs à qui on pose la question suivante : comment
vivez-vous l’amour ?
Par Bruno TACKELS publié le 30 janv. 2013
Le Diable probablement
nous offre une nouvelle livraison consacrée à l’amour, ou plus
exactement à la manière dont le vivent les artistes de la scène et de
l’écran. C’est une actrice, Anne-Lise Heimburger, qui coordonne ce
numéro, où elle fait dialoguer ses homologues comédiens, Marina Hands,
Philippe Caubère, André Wilms, Eric Caravaca, Valéria Bruni-Tedeschi,
Charlotte Rampling, Denis Podalydès – sans s’oublier elle-même – avec
l’équipe de rédaction, essentiellement composée de psychanalystes. Une
série d’entretiens finement menés, où le thème bateau devient prétexte
à fureter dans leurs œuvres, pièces et films, pour s’enfoncer dans les
zones obscures de la création. Où l’on vérifie combien l’amour est un
moteur pour ces êtres créatures que l’on nomme acteurs, eux qui n’ont
pas peur de faire une place à l’autre pour faire vivre leur art. Très
vite, nous entrons dans la fabrique de leur métier, dans la part
secrète du travail des acteurs. Mais en témoignant de ce qui se joue
dans les répétitions, ils nous font comprendre combien ils puisent dans
la vie, dans tous les amours de la vie, pour jouer dans la fiction.
L’occasion de retrouver, en queue de comète de ce dossier « amoureux »,
l’immense metteur en scène Matthias Langhoff, malheureusement invisible
sur les scènes françaises, et pour des raisons qui n’ont rien de très
aimable. Il faut dire que les temps ont changé, et pas lui. Une sorte
de roc de mémoire vive, qui continue à regarder et penser notre monde
actuel, à partir d’un imaginaire profondément marqué par l’histoire, la
grande Histoire, et la sienne propre, qui n’est pas banale. Enfant, il
était le témoin d’étranges rencontres, dans le salon de son père,
Wolfgang Langhoff, lui aussi metteur en scène, qui avait accueilli
Bertolt Brecht dans le théâtre qu’il dirigeait, le Deutsches Theater
(l’équivalent de notre Comédie française), avant qu’il ne fonde le
Berliner Ensemble.
Fréquenter un tel homme ne laisse pas indemne, et oblige à mettre la
barre au plus haut. Il raconte cette anecdote qui le résume
parfaitement. Dans les années 1950-60, l’auteur Fridrich Dürrenmatt
avait lancé une grande enquête auprès des écrivains et des gens de
théâtre pour savoir si l’on a le droit de transformer les œuvres
classiques. Plutôt que de répondre par oui ou par non, Brecht écrit : « Nous pouvons, si nous en sommes
capables. »
Et Langhoff, depuis près d’un demi-siècle, se donne tous les moyens
pour en être capable. Avec comme principe inaltérable, l’amour des
textes (pas forcément des auteurs, qu’on a toujours le droit de trahir,
si on peut), qui seul
peut les rendre vivants, et produire de véritables spectacles, des visions.
Et puis cette clarté intransigeante qui lui faire voir et dire les
choses sans fard ni détour. Une frontalité qui se retrouve dans ses
spectacles, qui ne s’épargnent aucune démesure, lorsqu’il s’agit de
scruter les âmes humaines. En Européen véritable, il évoque les
différentes cultures qu’il a traversées, Allemagne, Suisse, Russie,
France, dont il restitue la moelle sur son plateau, qui est finalement
sa seule terre authentique.
Questionné par Anne-Lise Heimburger, Langhoff se livre avec précision
(lui qui ne raffole pas de ces exercices), sans doute parce qu’elle est
actrice, et qu’en plus elle a été « son » actrice, dans Dieu comme patient. Ainsi parlait Isidore
Ducasse, le montage qu’il fit des Chants de Maldoror
de Lautréamont. Il dit notamment son amour des acteurs, et tout ce
qu’il leur doit. Il parle de ce qui caractérise les acteurs qu’il aime,
plutôt rares dans le paysage français, de ceux qui ne sortent pas de
leur personnalité, mais cherchent au contraire à creuser leur propre
vie. Il évoque Evelyne Didi, Emmanuelle Wion, François Chattot, Marcial
Di Fonzo Bo et quelques autres, de cette troupe idéale sans laquelle il
dit bien ne pas pouvoir travailler. Et il clôt par cette phrase si
simple, si juste, juste amoureuse : «
Avec eux, je me dis, “Oui, je veux continuer.” » On leur
souhaite de trouver un refuge, en France, pour continuer longtemps.
Le diable probablement,
amoureux, direction Anaëlle Lebovits-Quenehen, Verdier 2012.
|